PRISMES
La couleur et la lumière, un jeu éternel
Les couleurs sont des actions de la lumière
Goethe
PRISMES est une exposition tout en reflet, en miroir, en lumière. C’est le ton donné pour la nouvelle présentation d’œuvres au Centre Européen de l’Action de l’Art Contemporain (CEAAC) à Strasbourg.
Jusqu’au 22 novembre, l’exposition collective réunit de nombreuses pistes de recherches plastiques autour de la lumière, doucement capturée par des artistes locaux. Le point de départ est le Traité des couleurs de Johann Wolfgang Goethe. Un traité qui se base sur l’analyse des polarités entre les couleurs. Goethe définit le jaune et le bleu comme les couleurs les plus pures. Le jaune se rapprochant le plus de la lumière et le bleu, reflet le plus fidèle de l’ombre.
Aujourd’hui encore, la lumière et la couleur sont au cœur de nombreuses recherches. Phénomène quotidien et insaisissable, il s’agit ici, de faire exister la couleur comme entité à part entière, libérée de toute contrainte. À travers l’écoute des couleurs, le spectateur est invité à percevoir ces phénomènes visuels autrement, avec tous ses sens en éveil.
La scénographie de l’exposition est aérée, agréable. Les formes sont limpides, simples et épurées. On trouve une composition qui alterne les créations très colorées et d’autres, plus mystérieuses. C’est un grand jeu qui s’opère, d’envois, de réceptions de reflets et d’absorptions de couleurs. L’exposition laisse s’exprimer entre elles les réalisations dans un parfait équilibre. Sur la totalité des œuvres, huit pour être exact, trois ont particulièrement retenue mon attention.
Capucine Vandebrouk : Hi Robert !
Un grand voile, d’une matière particulière, en PVC, irradie la pièce d’une multitude de reflets. L’œuvre se compose simplement de ce tissu suspendu. Pour Capucine Vanderbrouk, cette réalisation permet de rendre hommage au travail de Robert Morris. C’est à dire d’attribuer à la matière toute la symbolique de l’œuvre.
Robert Morris, dans les années 1970, créait des sculptures contemporaines souples, périssables et fragiles. C’est ce que l’artiste appelle « L’antiforme ». Il refuse d’imposer une organisation à la matière mais la laisse s’exprimer librement.
Capucine Vandebrouk propose d’associer le concept de « L’antiforme » avec celui des couleurs et des reflets. Ainsi, elle laisse la liberté à ces deux éléments de s’exprimer sans les dominer ni les maîtriser. Les reflets qui ne peuvent être saisis, ne peuvent se fixer sur la toile, mouvante et indomptable.
Capucine Vandebrouck – Hi Robert! Robert Morris – Wall Hanging
Gaëlle Cressent – Aube 1
Trois cercles pleins, de diamètres différents, qui capturent notre regard dans une mystérieuse fascination. Complètement opposé au travail présenté ci-dessus, ici, il s’agit bel et bien de fixer, de capturer l’insaisissable. Gaëlle Cressent dévoile sa rosée du matin, éternelle dans un parfum d’aurore. Elle travaille sur des panneaux de signalisation, des objets du quotidien. La rosée matinale s’inscrit, s’incruste dans la matière aux reflets délicats et mouvants. La circulation de l’œil et le mouvement du spectateur créent une interaction intéressante entre l’objet et le regard.
Gaëlle Cressent : Aube Gaëlle Cressent : Aube
Marina Gadonneix – Rock and Sand
Dans un coin de la salle, à l’étage, une image d’un bleu profond, habitée par de grands cubes règne sur son territoire. Ce grand format est accompagné de casque audio. Assis face à l’œuvre, casques vissés sur les oreilles, nous sommes guidés par la voix de l’artiste dans une calme méditation. L’espace devant nous se transforme. Ce qui semble être un cadre de grand format devant nous, devient finalement un espace vide qui nous entoure et nous complète. La couleur apparaît comme un soin : elle guérit les maux, adoucie les mœurs et apaise le regard dans une délicieuse fluidité.
Marina Gadonneix – Rock and Sand Marina Gadonneix – Rock and Sand